1.1 La structure du sommeil
Le sommeil est un état physiologique, périodique d'inconscience alternant plusieurs phases où les capacités sensorielles sont réduites. En effet, l'activité de l'organisme varie en fonction des différentes phases.
Comment étudier le sommeil ?
Pendant une nuit, 4 à 6 cycles de sommeil, long de 1h30 en moyenne, se suivent. Chaque cycle de sommeil est composé de plusieurs phases :
En premier lieu, il faut savoir que les différentes phases d'un cycle ont été notamment déterminées par les résultats de divers enregistrements de l'activité cérébrale, musculaire, oculaire.

Son invention est généralement attribuée au scientifique Richard Caton en 1875, bien que sa première utilisation sur l’homme fut réalisée par le neurologue Hans Berger, dans les années 1920.
Les principaux enregistrements sont :
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L’électro-encéphalogramme (EEG) qui mesure l'activité cérébrale grâce à de nombreux capteurs disposés sur le crâne. Cette activité cérébrale est caractérisée par les différentes ondes qui la composent :
- Les ondes Bêta (14-45Hz)
- Les ondes Alpha (8-12 Hz)
- Les ondes Thêta (4-8 Hz)
- Les ondes Delta (<3,5 Hz)
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L'électro-myogramme (EMG) qui mesure l'activité musculaire avec des capteurs positionnés au niveau du menton.
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L'électro-oculogramme (EOG) qui mesure l'activité de chaque œil.
Les différentes fréquences d’ondes

Les différents capteurs
L'hypnogramme

Hypnogramme représentant les différentes phases de sommeil au cours d’une nuit.
L'hypnogramme est le schéma d’une nuit, représentant tous les cycles et toutes les phases durant une nuit. Il a été réalisé grâce aux résultats de l'EEG.
Tout sommeil débute par un endormissement, transition de l’état d’éveil à l’état de sommeil : nous allons vous présenter le mécanisme d’endormissement, avec ses différentes étapes.Pour comprendre ce qui va suivre, penchons-nous d’abord sur ce qu’est une synapse.
Qu’est-ce qu’une synapse ?
Une synapse est le point de jonction entre deux neurones.
Il y a deux types de synapses : les électriques, qui se touchent et échangent des informations par influx électriques, et les chimiques, qui ne se touchent pas, et qui ont donc besoins de messagers chimiques. Une synapse relie l’axone d’un neurone avec une dendrite d’un autre neurone. Elle permet de transmettre l’information d’un neurone à l’autre. Ainsi, dans une synapse chimique, des messagers chimiques, appelés neurotransmetteurs (contenus dans les vésicules sphériques), vont permettre à l’information de passer d’un neurone à l’autre : ils vont traverser la fente synaptique (épaisse de seulement 0,02 µm) pour aller se fixer sur les récepteurs membranaires, ce qui va permettre leur ouverture, et ainsi l’entrée du signal

Schéma d’une synapse
dans le neurone. Il existe deux catégories de neurotransmetteurs : les excitateurs, qui vont favoriser la propagation de l’influx nerveux dans le neurone récepteur, et les inhibiteurs, qui vont diminuer la probabilité que le neurone suivant envoie un influx.
Que se passe-t-il lorsque l’on s’endort ?
Le principal facteur responsable de l’endormissement est la lumière. En effet, le changement d’intensité lumineuse, entre le jour et la nuit, déclenche l’endormissement. La rétine, située dans l’œil, est composée de trois types de cellules : les cônes, les bâtonnets et les cellules ganglionnaires. Ainsi, 1% de ces cellules ganglionnaires ont un rôle différent, car elles contiennent la mélanopsine, une molécule qui réagit à la variation de la luminosité en changeant de forme : c’est une molécule photosensible. Ainsi, lorsque cette molécule perçoit une absence de lumière, elle informe les cellules ganglionnaires par la voie rétino-hypothalamique, qui vont elles-mêmes transmettre le message aux noyaux suprachiasmatiques, également appelés NSC. Ces noyaux, situés dans l’hypothalamus, constituent notre horloge biologique interne, qui régule nos comportements et fonctions biologiques selon un rythme dit « circadien », de 24 heures, comme le cycle veille/sommeil, la température corporelle ou encore les sécrétions hormonales. Prévenus de l’absence de lumière, ils envoient des neurotransmetteurs à la glande pinéale, en passant par la moelle épinière. Informée de la baisse d’intensité lumineuse, la glande pinéale va donc produire de la mélatonine, l’hormone du sommeil, qui va alors être libérée dans l’organisme, ce qui entraine une envie de dormir.
En plus de la mélatonine, d’autres éléments entrent en jeux dans le processus d’endormissement. Au fil de la journée, les neurones émettent des décharges électriques, appelées potentiel d’action, ce qui nécessite la consommation d’ATP (molécule nécessaire pour le métabolisme). La consommation d’ATP entraine la production d’adénosine. Cette substance hypnogène est accumulée durant la journée. Lorsque les différentes substances hypnogènes atteignent un certain seuil, elles entrainent l’activation de certains neurones (situés dans l’hypothalamus) responsables de l’endormissement ; ce qui a pour effet d’activer la sécrétion de neurotransmetteurs inhibiteurs, tels que le GABA et la glycine.
En même temps, ces substances hypnogènes désactivent les structures responsables de l’éveil, qui libéraient des neurotransmetteurs excitateurs. Ainsi, les substances hypnogènes permettent une baisse de la production de neurotransmetteurs excitateurs, et une augmentation de la production de neurotransmetteurs inhibiteurs.
Quelles sont les différentes phases du sommeil ?
Le sommeil léger, introduit par l’endormissement lors du premier cycle, représente à lui seul la moitié du temps total de sommeil. Cette phase peut être divisée en deux sous parties, à savoir le sommeil lent très léger (phase 1, qui constitue 5% du sommeil), puis le sommeil lent léger (phase 2, qui représente 45% du sommeil). Pendant ces 2 phases, les capacités sensorielles diminuent progressivement, néanmoins, durant la période d'endormissement, le dormeur peut être réveillé par le moindre bruit, ne se rendant alors pas compte qu'il a dormi.
Sommeil lent très léger : phase 1

Enregistrements durant la phase 1
Sommeil lent léger : Phase 2

EEG durant la phase 2
Sur ces enregistrements, nous pouvons voir que l’activité cérébrale diminue : les ondes Alpha de l’EEG laissent place aux ondes Thêta, traduisant ainsi un ralentissement de l’activité cérébrale.
De plus, au niveau du tonus musculaire, nous observons une légère diminution ; néanmoins, l’activité reste apparente.
Quant à l’activité oculaire, les signaux observés sont faibles et irréguliers.
Enfin, pendant cette période, la fréquence cardiaque diminue et reste régulière, à l’instar de la fréquence respiratoire, irrégulière.
L’activité cérébrale durant cette phase correspond à des ondes thêtas : les fuseaux de sommeil (qui correspondent à une activité cérébrale intensive, et témoignent d’une inhibition de cette activité cérébrale) sont suivis de complexes K.
De surcroit, nous savons que, pendant cette phase, le tonus musculaire est très diminué, mais persiste. L’activité oculaire disparait, la fréquence cardiaque ralentit et reste régulière, tout comme la fréquence respiratoire.
Enfin, cette phase est aussi caractérisée par la baisse de la température corporelle.
Pendant le sommeil profond (les phases 3, constituant 7% du temps total de sommeil et 4, représentant 15%), les capacités sensorielles sont complètements stoppées, le dormeur ne réagit plus. L'organisme fonctionne à bas régime, avec un battement du cœur et une fréquence respiratoire très lente. Le cerveau est de plus en plus inactif ce qui rend le réveil forcé de plus en plus difficile. Elle correspond à la phase du sommeil réparateur, que nous étudierons plus tard.
Sommeil lent profond : phase 3

L’activité cérébrale est très lente, on observe l’apparition d’ondes delta (qui constituent moins de 50% de l’enregistrement) : les ondes sont amples et lentes.
L’activité oculaire est nulle, alors que l’activité musculaire est toujours présente, mais très faible. Enfin, les fréquences cardiaques et respiratoires restent stables.
Enregistrements durant la phase 3
Sommeil lent très profond : phase 4

Lors de cette phase, l’activité cérébrale est identique à la phase 3, sauf que les ondes delta occupent désormais plus de 50% du tracé.
Concernant les autres activités, elles restent les mêmes que pendant la précédente phase : les activités oculaires et musculaires sont inexistantes ; les fréquences cardiaques et respiratoires sont stables et régulières.
Enregistrements durant la phase 4
Le sommeil paradoxal (phase 5, qui constitue 27% du temps total) s'appelle ainsi car l'activité cérébrale et l'activité oculaire sont aussi vives que pendant l'éveil, voire plus vives, cependant, le tonus musculaire est presque inexistant. Ceci s'explique par le fait que c'est la phase de sommeil correspondant au rêve. De plus, cette phase est aussi plutôt longue : elle représente environ un quart de temps total de sommeil.

Sommeil paradoxal : dernière phase
Enregistrements durant la phase de sommeil paradoxal
L’activité cérébrale est ample et vive (en dents de scie).
Quant à l’activité oculaire elle est rapide et discontinue.
Cependant, le tonus musculaire est nul, mise à part quelques signaux vifs et soudains (non visibles sur ce graphique).
La fréquence cardiaque augmente avec la tension artérielle ; et la fréquence respiratoire est irrégulière.
Entre deux cycles de sommeil, on observe un temps de latence, très court, où les capacités sensorielles sont réactivées, et où le cerveau juge si le réveil est nécessaire, en cas de danger.
Entre deux cycles de sommeil, on observe un temps de latence, très court, où les capacités sensorielles sont réactivées, et où le cerveau juge si le réveil est nécessaire, en cas de danger.
Image récapitulative :
Sur ce document, nous voyons bien l’évolution de l'activité cérébrale au cours d'une nuit.
Nous constatons la forte différence entre l'activité d'un individu éveillé et celle d'un autre, endormi.
Ainsi, nous pouvons affirmer que l'EEG a permis l’établissement des différentes phases de sommeil.
EEG des différentes phases