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3.1 Les effets des substances ingérées

 

Parmi les substances les plus consommés par les adolescents, la tête de liste est occupé par le café, les somnifères, l’alcool et le cannabis. Nous allons donc voir quels sont les impacts de la prise de ces substances sur le sommeil.

 

3.11 Caféine

 

La caféine est un excitant bien connu que l'on trouve dans de nombreuse boissons, surtout le café, mais aussi dans certains aliments, comme le chocolat. C'est à l'adolescence que l'on goûte réellement pour la première fois au café (apport en caféine le plus important), qui n'est alors plus considéré comme néfaste, comme c'est le cas pour les enfants. Mais les effets bénéfiques de cette boisson peut se retourner contre lui, car c'est en générale une des premières substances à effets sur l'organisme que l'on prend : sans recul sur les dégâts qu'il peut causer, la consommation est souvent trop intensive pour le corps à cette période.

Comment la caféine agit pour exciter le corps et empêcher le sommeil ?

Il faut, en premier lieu, se pencher sur le neurotransmetteur d'adénosine, qui est le produit de la dégradation de l'adénosine triphosphate (ATP), qui elle-même est une ''monnaie énergétique''. Elle provient de l’association d’une molécule d’adénine avec un ribose. Ainsi, plus l'activité cérébrale est forte durant la journée (plus on consomme d'ATP), plus on produit d'adénosine. Sa production est continue durant l'éveil, mais régulé par l’horloge interne. Cette molécule, libérée par les neurones, a pour rôle de ralentir l'activité cérébrale dans le but de nous faire entrer en somnolence, ainsi que de dilater les vaisseaux sanguins pour une

Représentation de la molécule d’adénosine

meilleure oxygénation du cerveau pendant le sommeil, surtout durant la phase de sommeil paradoxal où le cerveau est très actif. Pour ce faire, elle se fixe sur des récepteurs dans le cerveau, nommés A1, A2a, A2b, et A3. (Elle ne circule pas dans le sang, mais peut néanmoins être administrée en intraveineuse pour une forte dilatation des vaisseaux sanguins.)

Revenons à la caféine qui, une fois ingérée, ira dans le sang par le tube digestif jusqu'au cerveau où elle se fixera sur les mêmes récepteurs, empêchant alors l’adénosine d'y accéder. Ainsi, elle bloque l’accès à l'état de somnolence, nous empêchant alors de nous endormir. De plus, à forte dose, elle peut dérégler les différentes phases de sommeil. Notons que la dose maximale de caféine recommandée est de 600mg/jour, soit 6 tasses de café ou encore 2 à 3 litres de thé.

 

Le ''boost'' ressentit après un café est une conséquence de ceci : sans dilatation des vaisseaux sanguins, le cerveau est excité, et on a une surproduction d'adrénaline due à une sécrétion d'hormones, ce qui entraîne la libération de sucre dans le sang, ainsi que l'augmentation des activités respiratoires et musculaires.

C'est d’ailleurs ainsi que se crée la dépendance au café : avec une grande consommation, la production d'adrénaline est importante et constante, le corps s'y habitue, et lorsque cette adrénaline n'est plus présente, le corps ressent un manque d'énergie important, ne lui permettant plus de gérer correctement l'énergie naturelle du corps, le réflexe est donc de prendre un café pour répondre à ce manque : cela devient un cercle vicieux.

Teneur en caféine de divers aliments et boissons

Pour une tasse de café, la caféine atteint le cerveau en 5 minutes, elle agit au bout de 10 minutes, et atteint son effet maximum entre 15 minutes, et 2 heures après ingestion. Elle est totalement absorbée au bout de 45 min, et son action dure de 4 à 6 heures. Le thé a une action beaucoup moins forte sur l'organisme, mais aussi plus longue, de 6 à 8 heures. C'est pourquoi passé 18h, il est déconseillé de boire du thé ou du café, car c'est sur le sommeil profond que la caféine fait le plus de dégâts : il est plus court et fragmenté, le métabolisme est moins ralenti, et les bienfaits de la récupération sont donc atténués, et de plus, le sommeil paradoxal est plus long, ce qui demande plus d'énergie avec la forte activité cérébrale.

3.12 Somnifères

 

La France est championne d'Europe en consommation de somnifères, on estime que 10% de la population a recourt aux somnifères pour trouver le sommeil. Dans la tranche d'âge 15-25 ans on a tout de même 1 personne sur 10 qui est sous somnifère, tranche d'âge qui inclut nos chers adolescents. Cette prise de médicament augmente avec l’âge : 30% des personnes de plus de 65 seraient sous somnifères, puis 40% pour les plus de 85 ans. Ceci s'explique avec le dérèglement du sommeil avec l’âge, on a des nuits plus courtes, plus fragmentés, mais on fait en contre partie des siestes durant la journée. Il reste tout de même une sensation de manque de sommeil pendant ces courtes nuits d'environ 4 heures, sensation qui se traduit souvent par la prise de somnifère non utile, car sans réelle insomnie, en effet, seul 10% des gens sous somnifère ont de réels problèmes d'insomnie.

 

Quel est le mode d’action des somnifères ?

Il existe 3 grandes catégories de somnifères :

 

On a en premier lieu les benzodiazépines : ils se fixent sur les récepteurs de la molécule de GABA (récepteur nommé GABAA, présents partout dans le cerveau), qui sert entre autre à diminuer l'influx nerveux des neurones. Nos  benzodiazépines jouent le même rôle que le GABA, en l'aidant à diminuer encore d'avantage l'influx nerveux. Les récepteurs étant présents partout dans le cerveau, cela a un effet global sur toute l'activité cérébrale, donc forcément sur les zones responsables du sommeil. Les benzodiazépines restent indétrônables dans la catégorie somnifère, car c'est le plus efficace tout en étant le moins dangereux.

 

Si ce premier traitement reste léger, il existe les barbituriques, qui ont un effet bien plus lourd, et plus dangereux. En effet, ils agissent comme sédatif sur le système nerveux central en diminuant toute son activité impliquant une baisse de la fréquence cardiaque et respiratoire. Ce sont à la base des anticonvulsifs, mais ils peuvent être prescrits dans de rares cas de graves insomnies. De plus, mélangé avec de l’alcool, ils peuvent provoquer un arrêt respiratoire mortel. Ils deviennent de moins en moins utilisés dans le cadre de somnifères car pas assez efficace face à leur dangerosité, et pourraient même interdits à la vente d'ici quelques années.

Néanmoins, pour ces 2 premiers somnifères, l'utilisation doit être limitée car, non seulement ils entraînent une dépendance car le cerveau s'habitue à l'aide apporté, mais ils deviennent de moins en moins efficaces pour la même raison, ce qui nous invite à prendre des doses plus importantes, et ainsi commence le cercle vicieux.

Le cercle vicieux de la dépendance aux somnifères

Enfin, il reste les antihistaminiques. Normalement prescrits contre les allergies, il régit l'histamine, molécule étant à l'origine des réactions allergiques, mais qui joue aussi un rôle dans le contrôle de l'éveil. Les antihistaminiques, en bloquant les réactions de l'histamine, permet l’accès à la somnolence, puis l'endormissement. Ici, c'est donc un effet secondaire du médicament qui impacte le sommeil, il est donc aussi rarement prescrit dans ce but.

3.13 L'alcool

 

L'adolescence est le berceau du changement du corps et de la mentalité vers l'âge adulte, et très souvent la période des premières expériences, la première fois que l'on a une réelle prise d'alcool. Ainsi, 4 jeunes de 16 ans sur 5 déclarent avoir déjà consommé de l'alcool en dehors de cadre familial, et en moyenne les filles sont plus concernées que les garçons, tout cela bien que la vente d'alcool à un mineur soit strictement interdite. Cette tendance arrive de plus en plus tôt chez les jeunes, ainsi, dès la sixième, une personne sur deux affirme avoir déjà eu une réelle consommation d'alcool, même avant leur arrivé au collège. Ainsi, l'âge moyen du premier verre d'alcool est de 12,7 ans pour les garçons, et 12,4 ans pour les filles (étude au Québec).

Comment agit l'alcool sur le sommeil ?

Lorsque l'on boit de l'alcool, ce dernier passe directement du tube digestif dans le sang, puis dans tout l'organisme, y compris le cerveau. Ainsi ses effets sont très rapides et omniprésents. C'est le foie qui l'élimine en eau et gaz carbonique, l'alcool contenu dans un verre met environ une heure à être totalement éliminé par le foie.

 

Dès que l'alcool atteint le cerveau, il va modifier le fonctionnement de la membrane des neurones (comme une peau, ce qui les entourent), amplifiant les effets des récepteurs sur lesquels il va se placer. Il peut se placer sur les différents récepteurs de différentes molécules, mais sa plus forte action reste sur les récepteurs de GABA. Ainsi, en se plaçant sur ses récepteurs, il va amplifier son effet, laisser plus de GABA circuler, amplifier son action, ainsi réduire l'activité cérébrale. Mais l’alcool dérègle plusieurs récepteurs, de molécules ayant des fonctions différentes, opposées, certains inhibiteurs et d'autres excitateurs, même si au final, l'activité cérébrale se voit diminuée. Au final, le sommeil est réduit, fragmenté, avec une phase de sommeil lent profond et une phase de sommeil paradoxal réduites.

3.14 Les drogues

 

On retrouve des témoignages de l'utilisation de drogue comme somnifère dès l'antiquité, environ à 4000 ans avant J-C, par exemple, Hypnos, dieu grec du sommeil, donnant des fleurs de Pavot aux hommes pour prodiguer le sommeil aux mortels. Il y a même une légende chinoise, daté du VIème avant J-C, disant que Bouddha, luttant contre le sommeil, arracha ses paupières, puis, en tombant sur le sol humide, ces dernières germèrent pour donner naissance au premier pavot somnifère (plante utilisée pour la fabrication de l'opium).

Il n’existe pas deux drogues fonctionnant de la même façon, chacune a un mode opératoire différent, leur substances ne fonctionnent pas pareil, pas au même endroit dans le corps. Ainsi, elles auront toutes des effets différents sur le sommeil. Mais penchons-nous sur une des drogues les plus consommées pas les adolescents, le cannabis. En effet, 20% des jeunes de moins de 17 ans avouent avoir déjà goûté au cannabis, bien que son utilisation reste totalement illégale, du moins sur le sol français.

Comment fonctionne le cannabis ?

Le cannabis a un effet anxiolytique, c'est-à-dire qui joue sur l'anxiété due à une modification engendrée sur la sécrétion de mélatonine. Ceci altère aussi, par association, le rythme du sommeil : il diminue la phase de sommeil paradoxale, et augmente la phase de sommeil lent profond. En effet, une étude récente du National Institute of Health (Ministère de la santé aux U.S.A) a été réalisée sur 30 jeunes fumeurs réguliers. Pendant la journée, ils se sont vus administrés des doses de THC, une substance psychoactive du cannabis, suivi d'un contrôle sanguin le matin, après le réveil. Les courbes de concentration de THC et les changements des caractéristiques du sommeil concordent. Un taux élevé de THC le soir, induit un endormissement plus rapide, et un temps de sommeil total plus long.

 

Tout ceci est dû à l'anandamide, un neurotransmetteur produit naturellement par le cerveau, dont le rôle est d'induire un sentiment d’euphorie et de plaisir. Elle est surtout sécrétée pour lutter contre la crainte. Le mode d'action du THC est le même que pour les benzodiazépines, il se fixe sur les récepteurs d'anandamide : CB1 (système nerveux central) et CB2 (système immunitaire). Ainsi, en se fixant, il amplifie les effets de l'anandamide, surtout pour les récepteurs CB1 ce qui induit une analgésie (interruption du signal de douleur) du système nerveux central vers le cerveau. Cela provoque alors une baisse de l’activité cérébrale, donc des sensations d'euphorie, de relaxation. En plus de tout cela, le cannabis induit aussi une augmentation de l'effet d'inhibition du GABA, rendant alors le cerveau encore moins actif. Néanmoins, comme pour toute substance, le corps s'y habitue, le rendant donc de moins en moins efficace.

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